Photo ©Fred HEDIN Texte publié pour l’atelier d’écriture du site Bric à Book du 20 mars 2017.
La jeune femme en blouse blanche vient de refermer la porte de la chambre, y laissant Pierre encore un peu groggy. Il referme les yeux. Il sait qu’il est encore très tôt, qu’il a encore un peu de temps pour lui. Son esprit voyage un peu, ses sens s’engourdissent, sa respiration s’apaise. Il se sent partir. Il voit un ciel bleu. Il sent la caresse du soleil sur son corps. Il divague dans un monde inconnu. Il est bien, malgré la douleur qui le tiraille encore un peu. Mais la vie reprend ses droits dans le couloir, et le bruit ambiant le ramène doucement à la réalité de sa chambre. Il ressent encore les effets de l’anesthésique sur son corps et son esprit. Il aimerait que ses prochaines nuits ne soient pas aussi courtes, mais il sait qu’il n’aura pas le choix…
La lumière extérieure commence à filtrer par les stores. Il saisit une télécommande, appuie sur un bouton, et dans un bruit de moteur électrique usé, les lames qui ornent les trois grandes fenêtres se relèvent, laissant le jour pénétrer dans la pièce. Il agrippe alors un second boitier et le bouton sur lequel il appuie lui permet de relever tout le haut du lit. Il appuie sur un autre bouton et voilà ses jambes qui se plient. Il arrive en quelques pressions à se placer dans une position qu’il estime confortable. Il n’a plus qu’à tourner la tête et admirer le spectacle à sa fenêtre.
C’est un ciel bleu typiquement sans nuages : bleu, mais laissant apparaitre au loin un très léger voile d’une brume marron gris. Le premier vis-à-vis est un bâtiment de quelques étages dont la façade est tantôt composée de hautes baies vitrées exposant une fourmilière de bureau, tantôt recouverte de plaques de béton blanc qui a dû être immaculé un jour. Plus loin derrière, les feux orangés du levant se reflètent sur la haute tour vitrée d’un fameux groupe hôtelier. Pour une fois, il aimerait être photographe et saisir cet instant unique, car vécu seulement par lui, à ce moment précis, en ce lieu précis. Il sait que même de la chambre voisine, le point de vue doit être légèrement différent et ce n’est peut-être pas l’embrasement d’une tour proche du périphérique qu’il observerait dans cette aurore.
La tête lui tourne un peu. La fatigue le rattrape alors que la journée commence à peine. Il tente de se tourner un peu dans le lit. Une violente douleur vient lui scier le bas-ventre et tirer sur sa cicatrice qui parcourt son abdomen d’une hanche à l’autre, lui rappelant qu’il est hospitalisé. Il se remet sur le dos et manipule de nouveau la télécommande du lit. En quelques pressions, il se sent à nouveau dans une position confortable. Il ferme les yeux. Son esprit voyage un peu, ses sens s’engourdissent, sa respiration s’apaise. Il se sent partir. Il voit un ciel bleu. Il sent la caresse du soleil sur son corps. Il a l’impression d’être au pied d’une maison au toit rouge qui aurait été dessinée par un enfant, aux murs trop blancs, donc la fenêtre serait jaune comme un soleil. Il se laisse partir dans une somnolence qui sera bientôt de nouveau interrompue par une jeune femme en blouse blanche qui viendra fermer la fenêtre qu’il a ouverte sur son monde.
Je trouve que tu retranscris avec beaucoup de vérité le quotidien d’une personne hospitalisée. Les sens y sont « sur-stimulés ». Les répétitions apportent vraiment un plus dans le récit de cette matinée.
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Ça a été facile, j’en sors 😀
Merci.
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Les anesthésiques sont de puissantes drogues qui libèrent l’esprit, laissant le champ libre à l’imagination. Jolie divagation. Attendons l’infirmière ( mais maintenant elles portent pantalon et tunique 😉 )
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Je sais pour les tenues, mais même à écrire, ça laisse moins courir l’imagination
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En effet c’est très bien écrit. Et je suppose que le personnage c’est en fait toi?
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Merciiiii.
Il y a toujours un peu de moi dans mes personnages. J’ancre quasi systématiquement mes récitsalutations dans un fait réel 😀
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Très joli texte sur l’enfermement à l’hôpital et l’envie d’évasion. Tout sonne juste car tu as été cet hospitalisé.
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Merci
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Beaucoup de toi dans ce texte, et tu as entièrement raison … allongé, le corps s’éveille aux sens autour de lui … Alors quand en plus l’anesthésiant est là … Bien vu, bien croqué.
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Je n’avais pas vu ce commentaire… Merciiiiiii
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